Recouvrement contre un consommateur : attention au délai de prescription de deux ans
Les professionnels disposent d’un délai limité pour agir contre un consommateur en cas d’impayé : deux ans seulement.
Cette règle, souvent ignorée, est pourtant strictement appliquée par les tribunaux. Elle impose une vigilance accrue dans la gestion des créances.
1. Un délai abrégé pour les professionnels
Le cadre légal : deux ans pour agir.
Contrairement aux règles de droit commun (cinq ans entre particuliers ou entre commerçants), lorsqu’un professionnel agit pour obtenir le paiement d’un bien ou d’un service fourni à un consommateur, il ne dispose que d’un délai de deux ans, en vertu de l’article L 218-2 du Code de la consommation.
Qui est protégé par ce délai ?
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Un consommateur est une personne physique agissant pour ses besoins privés, en dehors de toute activité professionnelle.
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Les personnes morales (même non commerciales) ne bénéficient pas de cette protection.
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Le professionnel peut être un artisan, un entrepreneur, un avocat, un prestataire, un vendeur, etc.
Ce que cela signifie concrètement :
Une facture impayée, un solde de travaux ou des honoraires dus ne peuvent plus être réclamés au bout de deux ans, sauf si le délai a été interrompu (voir plus bas).
Il s’agit d’une règle impérative, à laquelle on ne peut déroger par contrat.
Et du côté du consommateur ?
Le consommateur, lui, garde la possibilité d’agir contre un professionnel pendant cinq ans, selon le droit commun.
2. À partir de quand court ce délai ?
Le principe : à partir du moment où la dette devient exigible.
Selon l’article 2224 du Code civil, la prescription démarre le jour où le créancier a eu connaissance des faits lui permettant d’agir.
Quelques cas pratiques :
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Pour un crédit, la prescription court à chaque échéance impayée.
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Pour des honoraires d’avocat, le point de départ correspond à la fin du mandat.
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Pour des travaux ou des prestations, la Cour de cassation a précisé que la prescription commence à l’achèvement des travaux, et non plus à la date de la facture (Civ. 1re, 11 mars 2021, n° 18-25.036 ; Civ. 3e, 16 mars 2023, n° 21-21.311).
Ce qu’il faut retenir :
Ce n’est pas la date de la facture qui compte, mais la date à laquelle la prestation est terminée et que la créance devient exigible.
3. Quelles sont les interruptions possibles ?
La prescription peut être interrompue, mais pas par n’importe quel acte.
Voici les principaux cas d’interruption :
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Une reconnaissance de dette par le débiteur
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Une assignation en justice (y compris en référé)
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Un acte d’exécution forcée (exemple : saisie)
⚠️ Attention :
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Une mise en demeure, même en recommandé, n’interrompt pas la prescription.
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Une expertise amiable non plus. Seule une expertise judiciaire a cet effet.
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Le dépôt d’une requête en injonction de payer ne suffit pas : seule la signification de l’ordonnance interrompt le délai (Civ. 2e, 5 févr. 2015, n° 13-21.176).